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16 mars 2008 7 16 /03 /mars /2008 13:06
          N’être pas bretonnant (ou bretonnisant ou encore britonnisant) serait-il la clause profane interdisant de s’interroger sur la qualité de la « langue bretonne » enseignée aujourd’hui.
Tout breton ne peut ignorer qu’il n’existe pas une langue bretonne mais au moins quatre correspondant aux régions :
            - du Trégor,
            - de la Cornouaille,
            - du Léon
            - du Vannetais,
 
La crédibilité des défenseurs des langues régionales ne saurait être mise en question et se verrait même renforcée si ces derniers militaient aussi ardemment pour la défense de ces quatre  langues, chacune dans leur milieu géographico-linguistique respectif. Ce concept serait en accord avec leur  thèse qui se veut être la défense et la promotion des langues dites minoritaires dans les lieux où, même agonisantes, les anciens la pratiquent encore.
 
Dans un compte rendu de conférence organisée par l’association « Diwan » à LANNION le 28 mai 1988, M. Claude HAGEGE, linguiste renommé, y faisait l’apologie de l’apprentissage du bilinguisme par immersion sur lequel est fondée la pédagogie pratiquée dans les écoles « Diwan ».
(Le compte-rendu de cette conférence étayait le dossier de présentation de l’école « Diwan » destiné aux politiques du pays de DINAN)
Après avoir décrit tous les avantages d’un tel enseignement, l’orateur terminait son propos en ces termes : « ... La culture locale n’est pas une résurrection artificielle entreprise par des intellectuels qui entendent donner à leur conscience une ou des raisons de se rassurer. Ce n’est pas davantage une sorte de ressourcement artisanal destiné à nourrir une revendication politique, mais tout simplement une reculturation vers quelque chose d’authentique et d’ancien.... ».... « Je tiens à dire que je donne ma caution de linguiste professionnel à la promotion de la langue bretonne. »
 
Douze années plus tard, dans son ouvrage « Halte à la mort des langues », M. HAGEGE semblerait revoir sa perception de la langue bretonne actuellement enseignée. Illustrant son approche du déclin des langues « minoritaires » par l’expérience irlandaise : « Le gouvernement irlandais a promu à partir de 1958 une forme écrite, fondée sur certaines variantes modernes, et à laquelle il s’est efforcé de donner une autorité réelle en organisant son enseignement à tous les niveaux du système d’éducation, et en l’utilisant dans l’administration et dans les documents officiels chaque fois qu’une version irlandaise est recommandée à côté de la version en anglais Mais il ne semble pas que cette entreprise ait ralenti le déclin que subit l’Irlandais depuis plus d’un siècle et demi face à la concurrence de l’anglais Car la minorité de ceux qui, dans les comtés de l’Ouest, ont encore un maniement naturel de cette langue, se sert des variantes dialectales, dont l’existence vivante à plus de réalité que des créations artificielles.
Cela est encore plus vrai pour le breton. Du moins l’Irlandais profite-t-il de son statut officiel dans la constitution du pays, qui rend moins illusoire la promotion d’une norme. Mais quand la langue supradialectale que l’on entend promouvoir n’a de statut que régional, alors les usagers des variantes locales ont plus de raisons encore de la juger artificielle, et de ne pas souhaiter s’en servir. Le breton unifié que l’on tente de favoriser a le mérite d’exister et devrait, évidemment, permettre une renaissance de la langue. Mais les usagers des parlers restent souvent méfiants à l’égard d’un breton construit, qui n’est pas la langue maternellede quelqu’un. Il convient, au demeurant, de na pas exagérer la dispersion dialectale du breton. L’expérience prouve que tous les Bretons se comprennent quand ils utilisent leur parler local. Le problème d’un breton unifié se pose, certes, mais le déclin du breton s’explique aussi par d’autres causes que l’absence de cette norme fédératrice. »
 
Trahirait-on la pensée de M. HAGEGE en voulant supposer qu’en ces quelques lignes, il résume parfaitement le problème de cette néo-langue bretonne aujourd’hui exclusivement préconisée et enseignée : elle peut avoir la sonorité du breton mais elle restera à jamais un ersatz humiliant des parlers locaux historiquement ancrés et quotidiennement usités avec truculence par le vieil autochtone qu’elle renie jusqu’à les vouloir anéantir.
 
Qu’est-ce donc cette néo-langue bretonne dite « breton unifié » voire « breton surunifié » ?
 
Elle est l’œuvre de M. Louis NEMO né en 1900 et mort en 1978. Ce défenseur militant intransigeant de la langue bretonne découvrit celle-ci vers l’âge de 20 ans. A 23 ans, la revue « Breiz Atao » publie ses premiers articles en breton signé de son nouveau nom «britonnisé» : Ropars HEMON.
Celui qui sera l’auteur en langue bretonne le plus productif se posera aussi en activiste doctrinaire d’un nationalisme breton exacerbé, mettant au ban tout ce qui avait trait à la République Française.
Je me réfèrerai à nouveau à ce qu’écrit Fanch BROUDIC dans son livre « Le Breton, une langue en question » :
« Dans son entreprise littéraire, R. Hemon adopte en effet le parti de l’esthétisme : « je réclame de la beauté et de la lumière en notre langue ». Et simultanément, celui de l’élitisme:" Est-ce à vous de perdre votre temps à apprendre les patois? Ou au peuple de s'éduquer en apprenant la langue unifiée (...) Presque toutes les erreurs que l'on a commises jusqu'à présent en Bretagne proviennent  de ce faux principe de base:il faut que les leaders aillent vers le peuple, ce n'est pas au peuple de venir vers les leaders. (...)"
La méthode retenue par R. Hemon ne consiste pas à recueillir l'assentiment général: le résultat devra être atteint malgré les oppositions. (...)Le contraste n'est pas que grammatical entre la langue et l'histoite qu'il s'approprie en termes de "notre langue" et de "notre histoire", marquant ainsi sa propre vision de l'une et de l'autre, et celles qu'il faut inculquer "à nos compatriotes qu'il faut "leur" apprendre puisque la langue qu'ils parlent n'est pas la bonne. Il s'agit de créer un homme nouveau en Bretagne.Il ne s'agit pas de sauver la langue bretonne (selon une expression bien établie) mais c'est la "Bretagne" elle-même qu'il faut "sauver" et l'assentiment des bretons eux-mêmes n'est pas nécessaire:"la Bretagne sera sauvée le jour où nous aurons créé en dépit de tous et contre tous, une vie nationale en Bretagne (...), le jour où nous aurons appris à nos compatriotes à lire et à écrire notre langue, le jour où nous leur aurons exposé notre histoire, le jour où nous aurons amélioré notre langue, formé notre littérature..."
Le breton sera, bien entendu, une langue d'Etat, la langue d'un Etat qui n'existe pas encore, mais dont on anticipe la création en faisant comme s'il existait:"si l'on ne s'efforce pas de restituer au breton sa véritable place comme langue de la connaissance, de la littérature, de l'enseignement et de l'Etat (...), cela ne vaut pas la peine de lutter pour lui."
(...)
Sur le plan linguistique, il (R. Hemon) est puriste: il refuse la langue bretonne telle qu'elle est, et la conçoit seulement comme elle devrait être. (...) il considère le français comme la langue de "l'étranger". (...) Le breton (dans sa variante "patois") est la langue de la paysannerie. (...)
Roparz Hemon n'est pas sûr de son breton et il envie les auteurs populaires:"pourvu que nous soyons un jour aussi habiles en notre breton qu'ils l'ont été en leur breton aptois!". Quand il élabore un nouveau dictionnaire, ce n'est pas pour y inclure des tournures de la lalangue populaire, ni davantage pour y inclure  les acquis de la linguistiques, à l'égard de laqquelle il est d'ailleurs extrèmement critique. Souverainement, il décide de n'y faire figurer que les termes qu'il a collectés chez les créateurs du breton littéraire, chez ses collaborateurs et ... dans ses propres oeuvres! La terminologie comme la problématique linguistique hémoniennes sont significatives de ses a priori: la qualification de la langue bretonne généralement en usage en terme de "patois", les options affichées en faveur d'un purisme lexical érigé en doctrine et en faveur d'une langue littéraire dont il reconnaît par ailleurs qu'elle n'existe pas encore vraiment, relèvent à nouveau les choix d'ordre idéologiques retenus par son fondateur."

Dans un article paru dans le journal Ouest-France le 15 mars 2008, on peut lire: "Les parents qui choisissent Diwan sont motivés par deux raisons : retrouver leur culture d'origine, mais aussi donner à leur enfant un atout supplémentaire : être bilingue très jeune facilite beaucoup l'apprentissage d'autres langues. Une vertu de plus en plus connue et reconnue, qui permet de ne pas cantonner Diwan à la défense de la culture bretonne."

              
Comment parler de « retrouver sa culture d’origine » quand :
 -  la langue bretonne n’a plus été usitée depuis plus de mille ans, soit 40 générations, dans notre région,
 -  la langue enseignée est, au vu de ce qui précède, une langue artificielle?

Que sont devenues "les variantes dialectales, dont l’existence vivante a plus de réalité que des créations artificielles." ?  Cl. HAGEGE.
    
              Peut-on alors honnêtement  invoquer "la défense de la culture bretonne" ?
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
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commentaires

R
j'se d'accord do ta passe que pour le patois qu'les gens d'la ville nomme le gallo, c'est du pareil au méme. Y'a des villotins qui caouse patois, on n'les comprend point,. Y n'ont point l'accent d'ici.<br /> Y caouse, y caouse... mais un ratiaou, ça n'se dit point un "ra-ti-illo".<br /> On rigole ben do ieux passe qu'y s'creillent ben caouser! Et c'est illeuill qui nous prennent pour des bouzous!
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