« - D’habitude, comme depuis plus de 20 ans, je viens avec plaisir en Bretagne. Bien sûr, on commençait à sentir quelques mauvaises odeurs à la sortie du péage de « La Gravelle », porte de la Bretagne. Jusqu’à cette année, on s’en accommodait et on finissait par les ignorer. Mais cette année, à notre arrivée dans les Côtes d’Armor, notamment dans la région de DINAN et sur l’axe routier menant à St BRIEUC, c’est devenu pestilentiel, plus qu’incommodant... Il faut être aveugle pour ne pas les percevoir. Que se passe-t-il ? Vous voulez faire fuir les touristes ? Les étrangers ? Et vous ne pensez pas que le fait que vous ne réagissiez pas peut s'interprêter comme une caution tacite de l'acceptation de cette nuisance. Je crains qu’avec une telle attitude à l’égard des visiteurs, vous ne transformiez à courte échéance votre région de terre d’accueil en terre d’écueils.
- Des mesures ont été prises, m’empressai-je de le rassurer. Le Conseil Régional et le Conseil Général des Côtes d’Armor, de conserve avec les Associations de Défense de l’Environnement, font tout ce que la loi leur permet pour endiguer ces outrances. Jadis, la Bretagne c'était l'air iodé, aujourd'hui, c'est l'air "lisier" . Le combat s’avère difficile. On ne peut en quelques années réparer les erreurs récurrentes depuis quelques 4 décennies. Nous avons tous conscience de cette pollution dont la puanteur que vous évoquez, aussi désagréable fut-elle, est un problème mineur par rapport à tout ce qui se déroule en amont au plan économique et politique et surtout par rapport à toutes les conséquences produites en aval avec, en exergue, les effets pervers sur les populations locales qui risqueront de vouloir interroger les politiques quand elles prendront pleinement conscience de l’étendue des dégâts connexes sur leur vie quotidienne. Comme vous, j’espère que les marées vertes disparaîtront rapidement de nos rivages...
- Je ne parle pas du lisier ou des marées vertes que je connais depuis longtemps et dont nous nous accommodons tant bien que mal, m’interrompt mon ami. Mais je trouve que vos observations restent bizarrement très pertinentes et fort opportunes. Je vous évoque la marée vert-de-gris encore plus nauséabonde que le lisier et qui a déferlé sur votre région gallaise.
Partout, on ne voit qu’affiches :
BRETON, MAÎTRE CHEZ TOI,
ou
PAS DE MOSQUEE EN BRETAGNE..
J’appréciais votre capacité à revendiquer une identité culturelle riche mais, cette année, depuis mon arrivée, je ne peux que constater que vous glissez sur une pente identitaire. Toutes vos plaques d’immatriculation portent le drapeau créé par Maurice MARCHAL alias MORVAN, créateur de Breiz atao et la mention Breizh, nouveau nom breton de la Bretagne dans la langue néobretonne inventée par Louis NEMO, alias Ropars HEMON ou encore PERDARAN, linguiste et célèbre animateur de Radio Rennes pendant l'occupation nazi et condamné aussi après la libération, non? Ne prêchait-il pas pour une langue unique comme première pierre vers l'indépendance de la Bretagne?
Pourquoi suis-je sensible à tout cela? Vous n’êtes pas sans ignorer qu’un membre de la famille de ma femme fut, en 1944 et à l’instar de beaucoup d’autres résistants bretons patriotes, dénoncé, torturé par des personnages qui arboraient ce drapeau, symbole de leur idéologie identitaire avant d'être exécuté par les nazis. Alors je n'ai pas oublié, je n'oublie pas, je n'oublierai pas, et mes enfants non plus, j'accorde une importance extrême à ce devoir de mémoire.
Je ne comprends pas comment vous qui vous revendiquez comme détenteurs et garants de votre passé provincial puissiez occulter ce sombre pan d'histoire récente.
Au fait, comment se dit et s'écrit "Bretagne" en "gallo"? Pourquoi n'est-ce pas inscrit aussi en cette langue? Seriez-vous intellectuellement dans une phase de colonisation linguistique?
Quand je vois ce qui se déroule actuellement chez nous, en Belgique où le racisme et l’ostracisme sont ouvertement revendiqués par les indépendantistes flamands, je suis sincèrement inquiet pour votre avenir... Mais j'insiste: ne craignez-vous pas que votre absence de réaction face à cette invasion idélogique plus que douteuse ne soit interprétée comme un aquiescement ?»
Telle fut la première réflexion d’un ami étranger francophone qui vient traditionnellement passer ses vacances dans notre région et le contenu de notre premier entretien.
Je n’osai lui révéler que le choix de ce symbole sur les plaques minéralogiques était celui décidé par le Conseil Régional de Bretagne... (!!!???)